Bienvenue dans l’espace Schengen?
Les transporteurs bulgares et roumains déplorent des désavantages concurrentiels. Il y a 13 ans la Commission européenne a confirmé que la Bulgarie et la Roumanie remplissent toutes les conditions permettant d’adhérer à l’accord de Schengen. Le 31 mars 2024, ces deux pays obtiennent enfin l’accès à l’espace Schengen par voies navigable et aérienne. Pas par voie terrestre en raison d’un veto de l’Autriche. Ce qui est peu apprécié, nous apprend Frank Stier, correspondant de l’ITJ.
L’Autriche émet des réserves surtout à propos de la protection par la Bulgarie des frontières externes de l’UE contre l’immigration illégale. «Notre position est claire et inchangée», a déclaré le chancelier autrichien, Karl Nehammer, le 9 mars au terme d’une visite chez le chef d’État roumain Klaus Iohannis: «Actuellement, le système Schengen ne fonctionne pas, donc il ne peut pas être élargi.»
Bien qu’à l’avenir ils seront libérés du contrôle des passeports lors de voyages par avion dans l’UE, de nombreux Bulgares et Roumains se sentent désavantagés et traités comme des citoyens de l’UE de seconde classe en raison des contrôles douaniers maintenus en trafic routier et ferroviaire.
Des représentants des secteurs transport de marchandises des deux pays déplorent eux des désavantages concurrentiels considérables de leurs sociétés membres sur le marché communautaire en ce qui concerne les prestations de transport sur la route et le rail. Selon l’Union des transporteurs routiers roumains (UNTRR), les attentes des camions roumains à la frontière hongroise sont en temps normal de huit à 16 heures, lors de jours fériés de trois jours avec des pics de cinq jours.
Pour entrer en Bulgarie, les attentes sont comprises entre 20 et 30 heures, en été il s’agit de trois jours. Les dommages économiques dus au blocus de Schengen de 2012 à 2023 sont estimés par l’UNTRR à 19,1 milliards d’EUR. «Rien qu’en 2023, les pertes ont été de 2,55 milliards d’EUR», a déclaré Radu Dinescu, secrétaire général, début mars lors d’une conférence à Bucarest.
Des pertes depuis 2012
En Bulgarie, trois fois plus petite en termes d’habitants, le président de la Fédération du capital industriel (AIKB), Vassil Velev, estime les pertes économiques dues à l’exclusion de l’espace Schengen à 0,5 milliard d’EUR par an.
À son avis, le pouvoir d’attraction de ce pays des Balkans est réduit pour les investisseurs étrangers et les marchandises deviennent plus chères. En janvier, il a demandé au gouvernement une «réaction forte», par exemple par des contrôles plus strictes du trafic marchandises autrichiens lors du transit vers la Turquie, et a lancé un appel aux consommateurs bulgares en leur demandant de «ne pas acheter de produits et de services autrichiens».
Aucun signe n’indique que son appel a été entendu. Philippe Kupfer, délégué économique de l’Autriche à Sofia, a en revanche enregistré depuis le début de l’année de nombreuses plaintes à propos de chicanes envers des camions liés à l’Autriche lors du traitement douanier aux frontières bulgares. «Cela concerne aussi des véhicules d’autres pays lorsqu’ils transportent des marchandises autrichiennes ou se dirigent vers l’Autriche», constate-t-il.
Pression des Balkans sur Bruxelles
La Commission européenne vise l’adhésion «routière» de la Bulgarie et de la Roumanie à l’espace Schengen avant la fin 2024 mais ne peut ignorer le veto autrichien.
Trois députés européens de la Bulgarie, de la Roumanie et de la Grèce ont donc proposé fin janvier une solution s’appuyant sur une idée circulant depuis assez longtemps déjà. Au lieu d’adhérer à l’accord Schengen, leurs pays pourraient créer un genre de «mini Schengen» ou «Schengen des Balkans». Un espace économique dans lequel les contrôles douaniers pourraient être supprimés dès l’été prochain.
Adina Valean, Roumaine et commissaire des transports de l’UE, a immédiatement rejeté cette proposition. «Consciente de ce que signifient les retards à la frontière pour les transporteurs», elle «s’est toujours engagée en faveur de la libre circulation». Elle rappelle toutefois qu’il «s’agit de penser à l’Union européenne en tant que tout».