Une vache à lait vitale
Avant d’entrer en fonctions en décembre 2015, Michael Laschet, cargo manager Allemagne d’Emirates Skycargo, a travaillé pour South African Airways à Francfort, pour Continental Airlines aux USA et pendant quatre ans pour le concurrent émirien Etihad Cargo. Mais même lui, spécialiste du fret aérien, n’a jamais connu d’époque comparable à celle en cours. Il explique à Andreas Haug, rédacteur ITJ, l’importance actuelle et future du fret aérien.
Monsieur Laschet, n’en avez-vous pas assez de la volatilité des activités fret aérien?
Au contraire! Pour moi, le charme du fret aérien est surtout la souplesse de la branche et l’énorme variété de marchandises que nous transportons. Dans le secteur du cargo, il faut sans cesse s’adapter au marché en changement constant. Il n’y a tout simplement pas de point mort dans le fret aérien, nous en sommes de nouveau pleinement conscients, surtout à l’époque actuelle.
Ces derniers mois, quelle a été l’évolution des affaires en termes de volumes?
Avant la pandémie, une grande partie du fret aérien était transportée par avions passagers. Chez Emirates Skycargo par ex., les avions all-cargo acheminaient environ 30% du tonnage global et desservaient quelque 40 destinations par semaine. Quant aux vols passagers, ils opéraient vers 140 destinations mondiales. Vu la baisse des capacités, nos volumes sont inférieurs à ceux de l’année dernière, mais c’est également le cas d’autres carriers fret. Le taux de remplissage est pourtant élevé et les volumes augmentent de nouveau peu à peu depuis quelques mois.
Pourriez-vous nous décrire la situation en Allemagne?
Actuellement, nous effectuons douze fois par semaine des vols passagers réguliers vers FRA en transportant aussi du fret. S’y ajoutent cinq liaisons hebdomadaires avec des avions passagers utilisés comme avions-cargos, cinq fois par semaine un pur service cargo vers Dubaï et une fois par semaine un autre vers Mexico. En octobre, nous offrirons trois vols fret vers Dubaï et Mexico via FRA. Actuellement, nous desservons MUC quatre fois par semaine avec des vols passagers réguliers acceptant aussi du fret. DUS et HAM bénéficient d’un vol hebdomadaire en avion passagers acheminant uniquement du fret.
Que constatez-vous en matière de types de marchandises?
Au début de la pandémie, lorsque la capacité fret était limitée, nous avons bien sûr accordé la priorité au transport de fret vital. Nous avons ainsi acheminé des EPI (équipement de protection individuel)surtout à l’importation alors que l’exportation a été marquée par des produits médicaux. Hormis dans le secteur automobile, nous constatons actuellement à l’exportation un mélange presque normal. À l’importation, nous en sommes de nouveau au point où les EPI baissent depuis quelques semaines alors que le trafic régulier revient progressivement.
Quels défis Emirates Skycargo a-t-elle mieux relevés que d’autres compagnies?
Après la suppression brutale des capacités fret sur les avions passagers, notre centrale à Dubaï a réagi très rapidement et mis au point un réseau fiable et sûr de vols effectués par des avions passagers transportant du fret. En avril, nous avons ainsi de nouveau desservi 50 destinations et début juillet 100. Actuellement, nous opérons de nouveau sur environ 75% de notre réseau de ligne existant avant la pandémie. Notre objectif était de garantir de manière constante un gain issu de nos opérations... et nous y sommes parvenus.
L’importance du fret a-t-elle changé depuis le Covid-19?
Avant la pandémie, le fret était déjà un secteur important d’Emirates Group. Mais son importance a encore continué d’augmenter puisque le cargo est devenu la «vache à lait» du trafic aérien. C’est pour le fret que nous avons transformé dix B777-300 et démonté les sièges de l’Economy Class afin de pouvoir transporter jusqu’à 15 t de marchandises en cabine. C’est un grand avantage surtout sur le marché asiatique. La crise nous a en tout cas montré que le fret aérien joue un rôle essentiel pour l’économie mondiale et pour le raccordement de nombreux endroits du monde à un approvisionnement fiable en marchandises vitales.