Bien paré pour le transfert
Celui qui est prêt, comme Gürhan Takil, patron de la maison d’expédition Taklog, à desservir des marchés au Caucase, au Moyen-Orient et en Asie centrale, a déjà dû faire preuve de souplesse avant la pandémie. Après la quasi-suppression de la variante nord de la nouvelle voie de la soie, cette petite société de Hof (Bavière) profite de sa grande expérience sur ces marchés.
Gürhan Takil est tendu: «Du fret humanitaire va partir tout à l’heure vers la Turquie, la semaine dernière nous en avons acheminé vers la Syrie», déclare d’emblée à l’ITJ le propriétaire de la maison d’expédition Taklog qui a repris en 2003 la filiale à Hof de TBT Transporte. Ces projets ne sont rien de particulier pour l’entreprise et seraient d’ailleurs difficiles à exécuter sans sa longue expérience dans des domaines spéciaux.
La société s’est focalisée sur la logistique avec l’Asie centrale jusqu’en Afghanistan qui représente 45% du volume de transport, le Caucase (un tiers) et le Moyen-Orient avec Chypre, le Liban et l’Irak. Cette orientation est aussi due à la biographie de G. Takil.
Au début des années 1990, il a fait un apprentissage chez Militzer & Münch pour se spécialiser par la suite sur le trafic avec l’Est. En 2002, il s’est installé à son compte. Aujourd’hui, il a quatre collaborateurs au siège et deux dans le bureau ouvert en 2004 dans la capitale ouzbèke Tachkent. Il s’y ajoutent quatre collaborateurs dans le bureau d’un partenaire à Mersin en Turquie.
Spécialisation géographique et plus
Ce sont des spécialistes lorsqu’il s’agit de transporter rapidement et à bas prix des marchandises de l’Europe centrale – et récemment plus souvent aussi de France et d’Espagne – vers l’Est. La route est la seule option, surtout pour les transports allant au-delà de la Turquie. «Nous avons dix remorques à bâche et 30 remorques frigorifiques bi-therm ADR et à double étage en service régulier. Des ordres allant au-delà vont à des sous-traitants», dit G. Takil à propos de l’approche avec peu d’actifs.
Les marchandises vont des produits liquides et chimiques aux produits pharmaceutiques (certifiés GDP aussi sur de très longues distances) en passant par les pièces de machines, matériaux de construction et matières premières. De l’Europe centrale à Almaty et retour, un camion met environ 70 jours.
La route du nord via la Russie a été jusqu’il y a un peu plus d’un an plus avantageuse, mieux aménagée et plus simple en raison du nombre moins élevé de frontières. Aujourd’hui, il ne reste plus que la variante du sud. Des approches de solutions, par ex. un échange de trailers à la frontière est de la Pologne, la tentative de grands transitaires biélorusses de fractionner leurs flottes composées souvent de plusieurs centaines de véhicules ou de créer des filiales en Pologne, se sont avérées non praticables, a constaté G. Takil.
Les marchés du sud sont déjà pleins, les efforts financiers et administratifs n’aboutissent pas toujours et la concurrence, en particulier turque, est plus souple.
Des goulets d’étranglement
«La route est plus sûre, mais plus chère de 50–60% et plus longue de dix à 15 jours», précise-t-il. Taklog la connaît bien et après le début de la guerre la société a même enregistré une hausse des activités. Selon G. Takil, le plus grand défi est ailleurs: «Les infrastructures de transport au-delà de la Turquie ne sont pas conçues pour les nouveaux volumes.»
Il serait ainsi normal qu’un camion attende trois à cinq jours à Bakou avant qu’un ferry ne le fasse franchir la mer Caspienne. En cas de vent ou de neige (ce fut le cas à Nouvel An), l’attente peut être de 15 à 20 jours. «Il faut développer les infrastructures», exige le transitaire, d’autant que les sanctions contre la Russie seront appliquées encore longtemps après la fin de la guerre dont la date est encore imprévisible.