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  • La construction navale, un «hidden champion» en Allemagne.

Auteur : Christian Doepgen


Artikel Nummer: 29096

La navigation est vitale

L’économie maritime allemande fait actuellement, sans doute à raison, état d’un contexte concurrentiel aiguisé. Rotterdam et Anvers affichent de meilleurs résultats que Hambourg et Brême en termes de croissance. Dans une perspective plus globale on constate cependant que les armateurs et exploitants portuaires souhaitent resserrer les rangs en Europe face à la concurrence de l’Extrême-Orient.


 

Commençons par la mauvaise nouvelle: les ports de mer allemands ont transbordé moins de marchandises en 2018 qu’en 2017. Selon les chiffres de l’Office Fédéral de la Statistique présentés lors de la Journée mondiale de la mer le 26 septembre, 296,5 M. de t de fret ont été transbordées l’an passé, soit 0,7% de moins qu’en 2017. La crise financière mondiale n’est pas étrangère à la situation. En 2018 et pendant les années fastes, les flux de fret transitant par les ports allemands représentaient encore environ 318 M. de t.

 

Le secteur maritime reste l’aiguillon de l’industrie logistique allemande. Face à la création de valeur générée par le fret aérien on trouve les importants volumes du secteur maritime qui en 2018 se sont avérés 58 fois plus importants que le fret transitant par les aéroports.

 

 

La construction navale sous pression

On oublie parfois que l’Allemagne reste un important site de construction navale. Même si les grands chantiers sont en Corée du Sud et en Chine, la construction d’un navire génère toujours près de 80% de retombées pour la sous-traitance en termes de création de valeur. Selon les analyses de la Fédération pour la construction et les techniques navales (Verband für Schiffsbau und Meerestechnik/VSM) la Bavière, le Bade-Wurtemberg, mais aussi la Rhénanie-du-Nord-Westphalie figurent parmi les principaux sites industriels sous-traitants, avec les constructeurs de moteurs marins MAN, Siemens, MTU, ZF et de nombreux fournisseurs de technologies de navigation et de systèmes de propulsion: «La sous-traitance emploie plus de 63 000 personnes pour un C.A. dépassant 10 milliards d’EUR.»

 

Du côté de la branche l’accueil est réservé face à l’engagement chinois. «Voilà des décennies que nous rencontrons des distorsions sur le marché sans contreparties», déclare Reinhard Lüken, directeur général de la fédération professionnelle VSM. «Cela doit cesser.»

 

 

Des aides publiques allemandes et européennes

Les mutations structurelles ont eu des conséquences définitives pour le secteur maritime. La flotte marchande allemande s’est réduite comme une peau de chagrin de 3500 à environ 2300 navires, les armateurs de 400 à 330. On recourt souvent à l’État pour les questions de concurrence, et ce n’est pas une exception allemande.

 

Le président de l’Association centrale des exploitants de ports de mer allemands (Zentralverband der deut­schen Seehafenbetriebe) Frank Dreeke en a récemment appelé à la politique. Que l’Allemagne soit championne du monde de l’export et de la logistique ne suffit pas, «pour exploiter plus avant ses forces le secteur portuaire allemand doit être débarrassé des désavantages concurrentiels», a-t-il martelé, en citant la procédure allemande de perception de la taxe sur les produits importés.

 

Même son de cloche chez les armateurs allemands qui inscrivent leurs revendications rondelettes dans une dimension européenne de la navigation. Suite à la récente publication du rapport du Forum international des transports de l’OCDE décriant l’attribution d’aides publiques ou plutôt l’exonération fiscale accordée aux exploitants portuaires publics de certains États membres. Les associations du secteur maritime européen privé, par ex. Feport à Bruxelles, demandent une révision des actuelles «European State Aid Guidelines» (SAG) de ce fait, arguant la position défavorisée des terminaux et ports privés. Gunther Bonz, président de Feport, pense qu’il est temps d’appliquer au secteur maritime un «Fitness check» européen, comme cela se fait pour d’autres branches (banques).

 

L’Association des armateurs de la Communauté européenne (Ecsa) et l’Association des armateurs allemands (VDR) ne partagent pas cet avis. Selon l’Ecsa, les SAG constituent «un instrument extrêmement efficace permettant de maintenir et de renforcer le secteur de la navigation marchande européenne dans un contexte hautement concurrentiel.» En outre, l’approche préconisée par le FIT dans son étude est critiquée car elle ne fait pas appel à des critères comparatifs internationaux. Les armateurs allemands ont également souligné cet aspect: «Le transport maritime ne doit pas être observé par un prisme purement européen, comme le suggère le rapport. En Europe, et surtout en Allemagne, nous sommes confrontés à une concurrence mondiale rude par rapport à des compétiteurs bénéficiant de soutiens.» Pour se battre à armes égales, le VDR considère les aides publiques à la concurrence comme indispensables. C’est aussi l’avis de la Commission européenne qui pense «qu’elles devraient être poursuivies.»