News

  • Photo: Chaisi/stock.adobe.com

Auteur : Andreas Haug


Artikel Nummer: 50608

Compte à rebours

Retards de livraison et prix en hausse dus à une chute de gouvernement. Le 8 août, trois jours après la démission de Sheikh Hasina et sa fuite en Inde, les analystes du fret aérien de World ACD ont constaté que les tonnages vers l’Europe ont de nouveau augmenté tout en précisant qu’ils sont encore nettement inférieurs aux chiffres correspondants de 2023. D’autres spécialistes s’attendent à une forte détérioration.


Les violences au Bangladesh avec des centaines de victimes et la chute du gouvernement qui a suivi auront à long terme des conséquences tant pour les importateurs que pour les consommateurs, sous forme de prix plus élevés pour les vêtements. Ce pronostic a été fait par Steffen Günner, gérant achats du prestataire de services Bay City. Il achète chaque année environ 30 M. de pièces – pour 20 marques européennes, chaînes commerciales et magasins discount – dans ce huitième pays du monde en termes de population.

 

Il contredit ainsi des représentants d’associations qui se sont exprimés récemment avec retenue à propos des conséquences des remous. «Ces prochains jours et semaines, les consommatrices et consommateurs ne ressentiront aucun effet. C’est vrai. Mais au plus tard à la mi-2025, les prix dans le secteur de la mode vont augmenter», craint le spécialiste en achats.

 

S. Günner estime que les commerçants et discounters en Europe devront répercuter la hausse de prix à l’achat et les coûts de transport sur les consommateurs. Bien que presque toutes les usines soient de nouveau ouvertes après une pause de deux semaines – des confinements décrétés officiellement par le gouvernement et des «jours fériés» début août – il y a d’ores et déjà des goulets d’étranglement en matière de livraison et des retards. Actuellement, les étoffes que le Bangladesh achète surtout en Chine pour les transformer sont bloquées jusqu’à trois semaines aux douanes des ports et des aéroports.

 

C’est ce que confirme Ralf Düster, managing director de Setlog, dont le logiciel SCM «Osca» est utilisé pour diriger les chaînes d’approvisionnement par Bay City et environ 150 autres marques des branches mode, électronique, produits alimentaires et matériel informatique. «Deux à trois semaines de retard concernant le délai de livraison estimé des marchandises, c’est ce que nous voyons et entendons actuellement dans la branche». Il a analysé jusqu’à la mi-août les données de 20 entreprises. Les marques de mode achètent plus d’un quart de tous leurs produits au Bangladesh.

 

Points faibles: douane + infrastructure

 

Les problèmes lors du dédouanement sont dus, selon S. Günner, au fait que les postes vacants n’ont pas encore été comblés par le gouvernement intérimaire. Mais les douanes ne sont qu’un chantier, l’autre étant l’infrastructure en mauvais état. Les violences entre les fidèles du gouvernement, d’une part, et l’opposition ainsi que les étudiants, d’autre part, ont endommagé de nombreuses routes et de nombreux bâtiments. Aujourd’hui, les transferts par bus des navetteurs jusqu’à leurs lieux de travail ne fonctionnent plus vraiment. «En moyenne, seuls 75% des effectifs travaillent actuellement dans les usines textiles», souligne S. Günner.

 

Ce qui exerce une pression sur les propriétaires et manager des usines. Ils ne peuvent respecter les plans de production et livrer les volumes convenus des mois à l’avance. Ce qui mène au cercle infernal de factures payées partiellement ou pas du tout par les importateurs et de salaires non versés depuis le début des manifestations à la mi-juillet.

 

La descente vers la crise du cash-flow

 

Les insomnies des managers ont également une autre raison: après les grèves des salariés du textile, une commission mise en place par le gouvernement a imposé il y a quelques mois une augmentation du salaire minimum de 56,25% à 104 EUR à partir du mois de décembre. «Ces augmentations salariales n’ont pas été prises en considération, tout comme la hausse du prix de l’énergie et l’inflation», précise S. Günner.

 

Il pense que beaucoup d’usines ne pourront sortir de leur crise de cash-flow. Mais si les salaires ne sont pas payés, les ouvriers vont de nouveau faire grève. «Les grèves ne sont pas toujours paisibles. Parfois les grévistes endommagent leur propre lieu de travail». S. Günner estime que les prix d’achat, par ex. moins de 1 EUR par t-shirt enfant, ne pourront plus être tenus pour les chaînes commerciales et discounters dans nos pays.

 

La durabilité en danger

 

De nombreuses chaînes commerciales, en particulier celles offrant des produits durables, hésitent pourtant à répercuter les hausses de prix des fournisseurs sur les consommateurs des marchés export. Ils réfléchissent à deux fois aux hausses de prix car «des fournisseurs à bas prix, négligeant la durabilité, leur enlèvent alors des parts de marché.»

 

Tant S. Günner que R. Düster craignent de voir le Bangladesh – malgré ses grandes capacités – perdre à l’avenir son rôle croissant d’«usine de couture de l’Europe» et second pays fournisseur du secteur de la mode en Allemagne si la situation ne s’améliore pas. «Ce serait aussi un énorme pas en arrière en matière d’objectifs climatiques», a ajouté R. Düster.

 

À cet égard, le Bangladesh – qui a tiré les leçons de la catastrophe de Rana Plaza en 2013 lorsque l’effondrement d’une usine textile a coûté la vie à plus de 1100 personnes et blessé 2500 personnes – a fait de gros progrès et devance nettement d’autres pays asiatiques où le thème de la certification en est en partie encore à ses débuts.

 

«Le Bangladesh offre en outre un bon rapport prix/qualité pour de la mode durable», a ajouté R. Düster. L’offensive en matière de durabilité de ce pays d’environ 170 M. d’habitants est une lueur d’espoir pour l’industrie textile.

 

«Les importateurs souhaitant proposer des produits durables se demandent vraiment s’ils doivent se détourner du pays de production Bangladesh», a déclaré R. Düster à titre de conclusion.

 

 

 

Encadré

 

L'industrie textile au Bangladesh


Avec des marchandises valant 7,1 milliards d’EUR et une part de marché de 20%, le Bangladesh a été en 2023 (2012: 12%) après la Chine le principal pays fournisseur de vêtements pour le secteur allemand de la mode. 85% des exportations du pays sud-est asiatique concernent la mode. Les quelque 4000 usines textile emploient plus de 4 M. de personnes, surtout des femmes.

 

 

Nouvelles connexes